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Récit : « En parallèle de mon job, je vais traverser l’Atlantique en solo »

Récit : « En parallèle de mon job, je vais traverser l’Atlantique en solo »

Victoire Martinet
Le 24 septembre prochain, Victoire Martinet – alias Marsouin Véloce – prendra le départ de la Mini Transat à bord d’un voilier sponsorisé par Chilowé. Voici comment elle en est arrivée là !

Il y a quelques années, je me suis mis en tête de traverser l’Atlantique à la voile en solitaire. Je n’avais alors jamais navigué seule, ou au large, et d’ailleurs naviguer n’était pas mon métier. Je me suis lancée dans ce projet il y a plus de deux ans sur mon temps libre en parallèle de mon job. À la rentrée, je prendrai le départ de la Mini Transat. J’ai 32 ans et voici comment je me suis retrouvée à préparer une aventure d’un mois en solitaire sur une petite coque de noix à travers l’Atlantique sans être une pro du bateau.

j'ai décidé de traverser l'Atlantique en solitaire
Victoire – alias Marsouin Véloce –

La mini-transat : c’est quoi ?

La Mini Transat est une course transatlantique en solitaire à la voile, sur des tout petits bateaux de 6,50 m de long, sans aucun moyen de communication avec la Terre. Elle n’a de « mini » que le nom (et les bateaux !), puisqu’elle nous emmènera cette année de la Vendée jusqu’à la Guadeloupe, en passant par les Canaries, soit près de 7 500 km ! Le départ sera donné le 24 septembre en baie des Sables d’Olonne, et si tout se passe bien, j’arriverai aux Antilles mi-novembre… j’y vais, mais j’ai peur !

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Quelle mouche m’a piquée ?

Traverser l’Atlantique n’a jamais été mon rêve, et j’ai eu beau côtoyer beaucoup de marins, je ne me serais jamais projetée dans cette épopée, m’en sentant bien incapable. Pourtant en 2019, alors que j’ai la chance d’assister à l’arrivée de la flotte de la Mini Transat en Martinique, j’ai un déclic. En écoutant les « ministes » (c’est comme ça qu’on appelle les participants) raconter avec des étoiles dans les yeux l’aventure qu’ils viennent de vivre en tête-à-tête avec eux-mêmes, une petite graine se plante dans ma tête : « Moi aussi, je veux vivre ce truc. Moi aussi, un jour, je veux arriver toute seule, sur un tout petit bateau, de l’autre côté de l’Atlantique ».

« Moi aussi, je veux vivre ce truc. Moi aussi, un jour, je veux arriver toute seule, sur un tout petit bateau, de l’autre côté de l’Atlantique ».

j'ai décidé de traverser l'Atlantique en solitaire
Il est pas beau mon bateau ?

Le projet mûrit véritablement pendant le confinement, au printemps 2020. Alors privés de liberté, nous sommes nombreux à avoir nourri des envies d’aventure et de sens ! À l’aube de ma trentaine, qu’ai-je accompli ? De quoi suis-je fière ? Je n’ai pas confiance en moi et passe mon temps à me censurer plutôt qu’oser.  Le besoin de réaliser un projet pour moi et moi seule devient alors une évidence, et j’achète un bateau… Traverser l’Atlantique n’était pas mon rêve, mais c’est devenu l’objectif que je me suis fixé.

Mon expérience bateau proche de zéro

Quand je reçois mon bateau en 2021, je suis vraiment novice. Je n’ai jamais navigué seule, jamais passé de nuit en mer, jamais été au large. Je ne connais rien aux manœuvres, aux réglages des voiles, à la météo… Je me lance simplement avec le bagage d’une personne qui aime la mer, les sports nautiques et les croisières entre amis, mais surtout la soif d’apprendre et de me donner tous les moyens d’y arriver !

j'ai décidé de traverser l'Atlantique en solitaire
Il se passe quoi si je tire sur cette corde ?

Se lancer sans être pro : bonne ou mauvaise idée ?

Je n’ai jamais imaginé me lancer à plein temps dans le projet. Garder mon boulot en parallèle était évident. Cela m’a permis de garder un bon équilibre, d’éviter le « trop-plein » et de garder un sens à tout cela : naviguer n’est pas mon métier, c’est ma passion ! Maintenir mon salaire était aussi gage de sérénité tout au long du projet, dont le budget est vite élevé. C’est un peu sport de cumuler, c’est sûr, mais avoir un temps assez restreint pour cocher des cases sur sa To-Do-List permet parfois d’être plus efficace !

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L’autre avantage, en me lançant comme débutante, c’est que je n’avais aucun a priori. J’y suis allée en toute humilité, sans me mettre la pression sur le résultat sportif. Ce qui m’intéresse le plus dans la Mini Transat, ce n’est pas la compétition, mais plutôt l’aventure et l’apprentissage. J’ai donc pris les étapes une par une, sans zèle, pour me préparer sereinement.

Ce qui m’intéresse le plus dans la Mini Transat, ce n’est pas la compétition, mais plutôt l’aventure et l’apprentissage. J’ai donc pris les étapes une par une, sans zèle, pour me préparer sereinement.

Première sortie en solo, première nuit en mer, première course, etc. En plus, on est assez bien guidés par le parcours de qualification à la transat qui est bien fait : pas question d’envoyer n’importe qui traverser un océan en solo ! Pour obtenir sa place sur la liste des inscrits, il y a un certain nombre de prérequis qui permettent aux coureurs de se préparer, pas à pas.

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Qui peut dire : « je sais me servir d’un sextant » ?

C’est incroyable comme en découpant un immense défi en petites étapes progressives, on se donne les moyens d’accomplir des trucs extraordinaires. On se rend vite compte que rien n’est impossible ! À chaque fois que l’on débloque une étape, on passe à la suivante, et on se retrouve sans s’en rendre compte à rallier les Açores en solitaires sur son petit bateau (véridique !).

Ma semaine type depuis 2 ans

Depuis deux ans, je travaille du lundi au vendredi en tant que Product Manager dans une start-up et je prépare ma Mini Transat sur mon temps libre : midi et soir, pendant les week-ends et les vacances.

Un projet de course au large c’est vraiment un projet entrepreneurial, avec énormément de composantes. Ce n’est pas que de la navigation (même si j’ai déjà avalé près de 15 000 km sur mon petit bateau depuis le début !) : il y a une facette « gestion de projet » (recherche de partenaires, de financements, création d’une boîte, etc.) ainsi que toute la préparation de la vie à bord. On est en solitaire sans aucun moyen de communication avec la terre, donc il faut savoir gérer tous les pépins de matériel, de corps, d’esprit… C’est beaucoup de formations (en météo, en électronique, en matelotage, en composite, et même en sommeil !), mais aussi des dizaines et des dizaines d’heures de bricolage et de préparation du bateau.

Récit : j'ai décidé de traverser l'Atlantique en solitaire
Retour à l’école

Je passe mes pauses dèj à la salle de sport avec une coach qui m’aide à décupler mes forces et à préparer mon corps à vivre dans une petite boîte qui bouge dans tous les sens pendant trois semaines sans me blesser.

Je passe mes pauses dèj à la salle de sport avec une coach qui m’aide à décupler mes forces et à préparer mon corps à vivre dans une petite boîte qui bouge dans tous les sens pendant trois semaines sans me blesser.

Le soir après le boulot, je passe bien souvent bichonner mon petit bateau, réparer ses petits bobos et optimiser le matériel. Le week-end je m’entraîne à Lorient avec d’autres camarades un peu fous, et je passe généralement mes vacances en course, pour engranger un max d’expérience à bord. Bref, ça donne un emploi du temps chargé, mais je n’ai jamais autant appris que pendant les 2 dernières années, et ça c’est vraiment passionnant !

Foire aux questions

Qu’est-ce que ça m’a apporté ? Je n’ai pas seulement progressé en bateau : je sais faire du composite, j’ai développé des compétences en électronique, en météo… C’est super à 30 ans de pouvoir redécouvrir et apprendre plein de choses. J’ai l’impression d’être retournée à l’école et ça m’avait manqué donc je profite à fond ! Je pense aussi que ce projet me donne un peu plus chaque jour confiance en moi et c’est vraiment ce que je suis venue chercher 🙂

À qui je recommanderais de faire une Mini Transat ?  Je recommanderais surtout à chacun de s’écouter et de se faire confiance : quand on a envie de quelque chose, c’est possible ! Il suffit de découper le problème et le prendre par étapes. Que ça soit pour monter sa boîte, écrire un livre, faire un ultra-trail, partir à l’aventure… On peut être tout à fait ordinaire et faire quelque chose d’extraordinaire. Après si vous êtes un peu fous, que la mer vous fait vibrer, que vous rêvez de glisser sous le vent pendant des jours et que le ti’ punch vous fait saliver, alors peut-être que la Mini Transat est faite pour vous 🙂

j'ai décidé de traverser l'Atlantique en solitaire
On est pas bien là ?

Combien ça coûte ? Il y a deux éléments à prendre en compte. L’investissement pour acheter le bateau (mais qui se revendra quasiment au même prix à la fin du projet) peut varier entre quelques dizaines de milliers d’euros pour les bateaux les plus anciens et jusqu’à 150k€ pour les bateaux les plus récents. Le budget de fonctionnement (qu’on ne récupère pas !) dépend vraiment de pas mal de choses. Il y a des coûts incompressibles (assurance, frais de port, inscriptions aux courses, maintenance basique) et des coûts sur lesquels on a le choix (achat de nouvelles voiles, matériels divers, coach, etc.). Je pense que le minimum vital c’est environ 20k€ par an sur 2/3 ans, mais ça grimpe vite !

Pour suivre la préparation de Victoire et son aventure en mer, rendez-vous sur son Instagram. Vous aussi vous êtes quelqu’un d’ordinaire qui un jour a décidé de vivre une aventure extraordinaire ? Votre retour d’expérience nous intéresse, vous pouvez écrire à marie@chilowe.com et peut-être voir vous aussi votre récit publié sur Chilowé !

Une fois par semaine, le meilleur de Chilowé pour toutes celles et ceux qui aspirent à un mode de vie local, joyeux et tourné vers la nature.