À peine l’été a pointé son nez que c’est déjà l’heure du troisième épisode de la série Ultra-papa en route vers l’UTMB. Je vous écris ces quelques lignes en direct de Chamonix, juste après avoir passé la ligne d’arrivée du 90 km du Mont-Blanc, cette course de coeur et de rêve dont je vous parlais dans l’épisode 1. Parce qu’entre deux foulées, un lever de soleil magique et quelques hallucinations, une idée m’a sauté aux mollets : le trail, est-ce un effort physique, mental ou les deux ?
Sommaire
Retour sur le 90km du Mont-Blanc
Ce week-end, j’ai donc pris le départ du 90 km du Mont-Blanc, un parcours ultra-technique et très alpin, le tout sous des conditions météo brûlantes. MAIS QUEL KIFF ! J’ai pris beaucoup de plaisir dans l’effort et surtout, j’ai validé de nombreux points pour la suite et l’objectif de la fin d’été.
✅ La gestion de course : partir doucement, oublier la montre, accepter de se laisser doubler, résister à l’envie de suivre celles et ceux qui partent (trop) vite, pour garder de l’énergie pour la fin.
✅ La nutrition : j’ai pu faire des tests en conditions réelles et difficiles, varier les plaisir, valider ce qui me convient, ce qui passe (ou pas) et mieux anticiper mes besoins.
✅ La fatigue : ayant pris le départ exténué, bien aidé par une semaine de nuits hachées par des jumeaux qui trouvaient que ce n’était pas assez dur comme ça. J’ai appris à réduire l’allure pour mieux écouter mon corps et me concentrer sur mes pas.
Bref, un test grandeur nature, avec beaucoup de hauts, quelques bas et ce sentiment précieux d’avoir passé un cap, malgré la fatigue et les semaines compliquées. L’UTMB n’est plus un rêve lointain, il est devenu une réalité qui se prépare, avec les jambes … et la tête !
À lire aussi : 👉 Ultra papa en route vers l'UTMB - Épisode 1
Dans la tête, oui… mais pas que
Je vous embarque cette fois-ci pour un voyage un peu particulier : dans ma tête ! Et plus précisément dans mon cerveau (c’est une image hein). Si on entend souvent que « le trail, c’est 10 % dans les jambes, 90 % dans la tête », est-ce que c’est vrai ? Est-ce qu’on peut vraiment compenser un manque d’entraînement par du mental ? Et surtout : comment on prépare son mental à encaisser 170 km de course et 10 000 m de D+ ?
Tout d’abord, cassons un mythe : courir une telle course sans s’entraîner mais avec un gros mental, ça reste une légende urbaine. On ne dit pas que c’est impossible, mais qu’il vaut quand même mieux éviter. Oui, il y aura toujours un cousin du pote de ton collègue qui aurait bouclé la course sans se préparer. Mais entre nous, c’est rare, très rare… voire un peu dangereux.
« Mens sana in corpore sano » : pour ceux qui, comme moi, ont sauté latin au collège, ça veut dire « Un esprit sain dans un corps sain ». Avant de parler de cerveau, parlons de nos muscles. Quand on se prépare pour une course de plus de 170km, on entend beaucoup parlé de préparation physique (PPG pour les intimes) et de renforcement musculaire. L’idée, se muscler suffisamment pour encaisser les chocs sur les sentiers, sans se blesser.
Alors honnêtement, j’ai essayé de suivre les séances imposées par le coach. Mais dans cette vie bien remplie, il faut aussi faire des choix et je privilégie le fait d’enfiler mes chaussures de trail plutôt que d’aller à la salle 3x par semaine. Mais facile en habitant Annecy, le terrain me permettant de courir tout en me musclant.
Donc si vous avez le temps et que vous habitez en ville ou autour d’un terrain sans trop de dénivelé, courez, mais pensez à vous renforcer.
À lire aussi : 👉 Ultra papa en route vers l'UTMB - Épisode 2
Muscle ton cerveau Robert !
C’est pas de moi, mais de notre Aimé Jacquet national. Enfin presque. Dans un sport d’endurance comme le trail, la préparation physique est évidemment essentielle. Mais passé un certain nombre d’heures sur les sentiers, ce sont souvent la tête et le mental qui prennent le relai. Si l’impact de la fatigue physique sur la performance est facile à mesurer, la fatigue mentale elle aussi réduit significativement les capacités, même si les jambes tiennent.
« On atteint vite les limites physiques. Ensuite, ce qui fait la différence, c’est la capacité mentale à supporter l’inconfort » – Kilian Jornet dans son livre Courir ou mourir, 2011
Même si on a envie de croire Saint-Kilian dieu des traileurs sur parole, voyons ce qu’en disent les études scientifiques. Une publication dans le Journal of Sports Sciences démontre que les stratégies cognitives, comme la visualisation du parcours et de l’objectif, la dissociation et la pensée positive améliorent significativement la performance.
4 dimensions majeures ont un impact sur la performance : physique (la plus connue), mentale (gestion du stress, des doutes et de la fatigue mentale), cognitive (visualisation du parcours et de l’arrivé, auto-persuasion) et enfin sociale (soutien des proches, assistance pendant la la course et leviers motivationnels).
En résumé, muscler son jeu oui, mais le reste aussi. Chacun à sa recette, avec des leviers qui marchent ou pas. Le plus simple c’est de tester tout ça au quotidien, dès l’entrainement.
Ce qui marche pour moi
À l’entrainement
Je le disais plus haut, le mental comme le physique, ça se travaille à l’entrainement, pour gérer au mieux avant et pendant la course. Si j’aime courir seul, c’est avant tout pour me reconnecter à moi-même en me reconnectant à la Nature. Mais quand on s’entraîne seul, pendant parfois 4 ou 5h, souvent très tôt ou très tard, il faut nourrir son cerveau autant que son corps.
Je cours depuis plus de 3 ans avec un casque à conduction osseuse de la marque Shokz. Ce que j’adore, c’est qu’il me permet de m’évader tout en restant très connecté à l’instant présent et à l’environnement qui m’entoure. Parce qu’entendre en même temps le chant des oiseaux et la voix de François D’Haene dans un podcast, c’est quand même le combo parfait. C’est aussi un super moyen de rester à l’écoute de ses sensations, de son souffle et de son rythme cardiaque. Et puis, sur des courses de 30 à 40h, j’ai toujours apprécié la discrétion du casque, qui ne crée pas d’irritation ni de gène et se laisse vraiment oublier. Testé et recommandé par votre Macareux Polisson national !
Du coup, je profite du temps d’entrainement pour écouter majoritairement des podcasts : GDIY ou Les Mécaniques du Journalisme quand j’ai envie de rester connecté à l’univers pro, Course Épique ou Dans la tête d’un coureur quand je veux m’inspirer de récits d’amateurs ou de pro. Et puis quand je veux juste me vider la tête, j’ai mon petit plaisir coupable avec le Super Moscato Show, qui me ramène à mes jeunes années de rugbyman.
Avant la course
Alors avec le temps, j’ai appris à ritualiser et apprivoiser cette phase où le stress monte et le doute s’invite, sans la nier. Prévoir et accepter pour mieux gérer.
👀 Visualiser le parcours : idéalement en faisant une reconnaissance en amont ou à défaut en épluchant toutes les vidéos Youtube que je trouve pour m’imaginer sur les sentiers. Visualiser les cols et démystifier les passages que je redoute. Ca permet aussi de segmenter le parcours en petites parties, pour le rendre moins impressionnant et se fixer des objectifs plus court terme.
🧠 Travailler la pensée positive : j’évite les discours anxiogène ou d’auto-sabotage du style “ça va être super dur”, que je les remplace par “tu as de la chance d’être là”. Je me projette les moments que j’ai envie de vivre : une vague de flow en haut du Grand Col Ferret ou le passage de la ligne d’arrivée avec les jumeaux.
🧘♂️ Désacraliser l’événement : alors oui, c’est l’UTMB, mais si j’en fais un sommet émotionnel inatteignable, je risque de me liquéfier avant même le départ. Alors je relativise, je repense au chemin parcouru et finalement à l’essentiel : se sentir vivant !
🥰 Préparer mes proches : je leur parle de ce que je vais vivre, de ce que j’attends d’eux. Juste un mot, un regard, une présence. Que je vive un moment d’euphorie ou de doute, les leviers et les discours ne sont pas les mêmes. Avec l’expérience, j’ai appris que les proches sur le parcours nous renvoient l’image qu’ils ont de nous. Si je suis dans le dur, ils le seront aussi. C’est donc important de les préparer à casser cette dynamique. Avec eux. Pour eux.
Pendant la course
Pour cet UTMB, j’ai décidé de ne pas partir seul. Je vais demander à mes proches d’enregistrer des messages vocaux que je pourrai écouter pendant la course. Quelques mots simples, une blague, un souvenir. Un peu d’eux avec moi, dans les oreilles, au moment où j’en aurai le plus besoin. Ce sera mon fil invisible avec celles et ceux qui comptent. Et peut-être, quand l’envie d’abandonner pointera le bout de son nez, ce sera justement cette voix familière qui me fera repartir.
Et parce que l’énergie vient aussi de vous, la communauté Chilowé, je vais lancer une playlist collaborative. Chacun pourra y glisser un morceau qui l’inspire, l’émeut ou lui file la patate. Cette playlist, je l’emmènerai avec moi faire le tour du Gros Blanc. Stay tuned !
Évidemment, je n’ai absolument pas la prétention d’en faire une science exacte et applicable à tous. Ce sont mes leviers, acquis après plusieurs années d’échecs et de réussite. Je vous invite à trouver les vôtres, pas à pas, étape par étape.
Et la suite ?
Le prochain épisode d’Ultra Papa en route vers l’UTMB s’attaquera à un sujet brûlant (et passionnant) : l’impact écologique des grandes courses de trail. Depuis les récents engagements de l’organisation de l’UTMB pour une course plus responsable), j’ai envie de creuser, questionner et surtout comprendre comment on peut concilier trail et engagement sincère pour la planète.
Mais en attendant, balancez vos astuces pour blinder votre mental / moral à mathieu@chilowe.com. Qui sait, votre petit secret se retrouvera peut-être dans mes écouteurs, au milieu de la nuit, quelque part entre Champex et La Flégère.

Une fois par semaine, le meilleur de Chilowé pour toutes celles et ceux qui aspirent à un mode de vie local, joyeux et tourné vers la nature.