Que vous n’ayez pas les moyens, pas le temps, que vous soyez des procrastinateurs nés ou au contraire en manque d’actions concrètes pour sauver le monde, nous avons une bonne nouvelle : on peut TOUS réensauvager le monde à notre échelle et notre manière. Un territoire réensauvagé, c’est une terre où la Nature a retrouvé sa biodiversité originelle et un écosystème autonome. Il existe autant de manières de le faire que de situations.
Réensauvager niveau débutant
Pour celles et ceux qui habitent dans un appartement ou pour qui les fins de mois sont aussi serrées qu’un chamois dans un sac de couchage : les actions sont plus limitées, mais nombreuses et surtout assez simples, à commencer par chez vous ! Le bord d’une fenêtre, la façade de son immeuble, les balcons et les terrasses (pour les petits veinards) sont des espaces extérieurs que l’on peut partager avec nos amis à plume et ailes !
À lire aussi : 👉 Réensauvagement : de quoi parle-t-on ?Quelques actions simples
- Faire pousser un foisonnement de plantes appréciées des insectes et des pollinisateurs (thym, glycine, bourrache ou encore reine de pré).
- Accrocher un hôtel à insectes qui sera un refuge pour l’hiver. Il est même possible d’en fabriquer un avec les moyens du bord (voici un tuto)
- Mettre un réservoir d’eau pour les oiseaux et des nichoirs. Vous en trouverez de toutes les formes et pour pas mal d’espèces sur le site de la Ligue de protection des oiseaux.
« Ces actions à petite échelle permettront de sauver quelques insectes et oiseaux et c’est toujours ça de pris. Mais si chacun le fait, l’impact sera énorme », explique l’ASPAS (l’Association de protection des animaux sauvages).
Ensuite, il est également possible d’agir à l’échelle de son quartier. On peut par exemple s’inspirer de @sfinbloom, cet homme déguisé en abeille qui arpente la ville de San Francisco en skate, un pot de graines de fleurs sauvages à la main pour faire fleurir le moindre lopin de terre !


Réensauvager niveau intermédiaire
Vous possédez un jardin (même petit) et vous avez décidé d’y accueillir gratuitement des locataires à poils, plumes, pics et carapaces. Pour cela, on vous propose de laisser un bout de votre espace vert en libre évolution. C’est à dire : ne pas intervenir, laisser la nature tranquille, reprendre ses droits.
Les do :
- On arrête de tondre et de ramasser les feuilles mortes. Ce sont de véritables cachettes pour de nombreux animaux comme les hérissons et cela protège la terre en dessous.
- On laisse tout pousser, même les plantes qu’on n’aime pas trop. Par exemple, les orties sont un formidable habitat pour les papillons qui y naissent et s’en nourrissent.
Les don’t :
- On ne laisse pas son chien ou son chat en liberté, surtout la nuit. Mistigri a beau vous faire les yeux doux, ses petites patounes toutes douces chassent et tuent les animaux sauvages.
- On ne met ni pesticide, ni engrais, on laisse la Nature se débrouiller toute seule. Vous verrez, elle fait ça très bien.
Rien de bien compliqué et pour cause ! « La libre évolution, c’est l’école de la paresse », explique Yolaine de la Bigne, porte-parole de l’ASPAS. « On voit les animaux revenir, c’est comme s’ils se passaient le mot ! » Des résultats visibles et rapides pour un effort minime : qui dit mieux ? « L’écologie c’est souvent démoralisant, anxiogène. La libre évolution c’est pour moi aujourd’hui un incroyable levier d’espoir et cela rend tellement heureux », conclut la porte-parole.


Réensauvager niveau expert
Puisque de toute façon le livret A ne rapporte plus rien, vous avez décidé d’utiliser cet argent pour réensauvager le monde. Et ça commence par un terrain ou une forêt dont vous faites l’acquisition dans le but d’en faire un espace naturel réensauvagé. Promis c’est pas bien compliqué.
Étape 1 : se rapprocher d’une asso.
Cela permet de recevoir de bons conseils, voire un accompagnement plus poussé (rdv aux étapes 3 et 4). Vous pouvez aussi vous arrêter à cette étape en faisant « juste » un don. Par exemple, l’ASPAS crée des Réserves de Vie Sauvage® et des Havres de Vie Sauvage®, deux labels, avec l’un des plus forts niveaux de protection de la nature en France. Grâce aux dons, l’asso acquiert des terrains, ou participe à leur protection pour les laisser en libre évolution, préservés de quasiment toutes activités humaines.
Étape 2 : acheter son propre terrain.
En 2024, le prix d’une forêt non bâtie va de 730 et 14 570 euros l’hectare, selon le Centre National de la Propriété Forestière (CNPF). Les montants varient en fonction de la région, du type de végétation et de la taille de la parcelle. Pour trouver une forêt à vendre, on peut s’adresser son notaire, au syndicat des propriétaires forestiers de sa région ou à la coopérative forestière de sa région. Pour racheter une parcelle à un particulier, on peut aussi trouver des petites annonces sur la plateforme La forêt bouge (choisir sa région, puis aller dans la rubrique « Foncier forestier »).
Dans la plupart des cas les vendeurs vous vanteront les bénéfices possibles d’exploitation de bois ou de gibier. Dans notre situation, le seul intérêt sera de voir cet espace se réensauvager et la nature reprendre ses droits !
Étape 3 : réensauvager son terrain.
Il existe plusieurs manières de réensauvager un espace naturel. On peut le faire de façon active en réintroduisant par exemple des espèces animales ou végétales, mais cette pratique doit être encadrée par des experts afin de ne pas faire n’importe quoi. On peut sinon choisir l’option passive et laisser le terrain en libre évolution.
À lire aussi : 👉 Pour protéger la Nature, faut-il la couper de l'Homme ?« Cela signifie par exemple que lorsqu’un arbre meurt, on le laisse se décomposer. Il devient alors une zone de vie incroyable pour les insectes », explique Coline Rual, responsable du Pôle Milieux naturels à l’ASPAS. En fait, le but de la libre évolution c’est de laisser vieillir la forêt. « On sait aujourd’hui que plus une forêt est vieille, plus la biodiversité est riche, plus elle joue son rôle de puits de carbone », poursuit l’experte.
Étape 4 : protéger ce terrain dans le temps.
Arnaud Hiltzer, le co-réalisateur de Rewilding Patagonia a fait, avec sa femme, l’acquisition d’un terrain à Chamonix attenant à un chalet familial. Ils ont pour projet de le réensauvager. Pour protéger le terrain dans le temps, ils ont signé une ORE : Obligation réelle environnementale. « Il s’agit d’un contrat signé chez le notaire qui permet à n’importe quel citoyen d’établir des lois sur son terrain pour le protéger sur une période donnée pouvant aller jusqu’à 99 ans. » Dedans, on peut mettre ce que l’on veut : interdiction d’abattre ce chêne centenaire, de casser ce mur au fond du jardin dans lequel les hirondelles viennent nicher, de boucher cette mare où vivent des rainettes ou encore de construire un bâtiment avec des fondations sur le terrain.
Ce qui est très puissant avec ce contrat, c’est qu’il s’applique au terrain et non au propriétaire. Il subsiste donc à la vente de la parcelle et même à la mort de celui qui l’a établi. « Aujourd’hui, on a engagé quelque chose au-delà de notre propre vie », lance Arnaud. Comme c’est un contrat, il faut être deux pour le signer. Il incombe donc au propriétaire de le signer avec une entité de confiance qui sera garante de son application et existera encore dans 100 ans ! Par exemple : un parc national, la LPO, l’ASPAS ou encore le Conservatoire d’espace naturel de votre département. Le contrat coûte 800 euros et il est possible de partager les frais avec l’entité avec qui vous signez.
Vous l’aurez compris, quel que soit votre niveau d’implication, le réensauvagement, c’est avant tout une envie et un état d’esprit.












