Laissez-nous retrouver la nature
Monsieur le Président de la République,
Vous l’avez dit dans votre discours du 28 octobre dernier annonçant ce nouveau confinement, dans la lutte contre la Covid-19 « rien n’est plus important que la vie humaine ». L’immense majorité des 67 millions de Français vous approuve et accepte de mettre provisoirement de côté ses libertés individuelles, au nom de la solidarité et de la fraternité qui unissent notre peuple.
C’est bien entendu notre cas ; tous ensemble, nous nous engageons au quotidien pour la protection des personnes les plus vulnérables face au virus. Depuis le 30 octobre, nous sommes donc confinés chez nous et ne sortons que munis d’une attestation : l’immobilité est devenue la règle, le déplacement l’exception.
Nous ne saurions remettre en cause la plupart de nos nouveaux devoirs, car nous comprenons leur utilité dans le cadre de cet engagement collectif : les gestes barrières font à présent partie de notre quotidien et cela fait 8 mois que nous n’avons pas pris nos proches dans nos bras. Pour autant, l’une des mesures du reconfinement suscite notre indignation et nous oblige à vous écrire : il s’agit de l’interdiction des déplacements liés à l’activité physique au-delà d’une heure quotidienne et d’un rayon d’un kilomètre autour de notre domicile.
Alors que nous nous apprêtons à vivre avec ce virus pour une période indéterminée, nous considérons que cette mesure met en danger la santé des Français, qu’elle est disproportionnée face aux objectifs qu’elle poursuit et qu’elle crée des inégalités au sein de la population. Nous vous proposons donc un encadrement plus souple et plus responsable des activités de plein air, que nous détaillons en conclusion de cette tribune.
Une menace pour la santé des Français
Cette pandémie a déjà tué 41 000 de nos concitoyens et le deuil touche chaque jour de nouvelles familles. Nous vous appelons pourtant à considérer dans le même temps les impacts que le confinement va générer sur la santé de l’ensemble de notre population à court, moyen et long terme.
Denis Masseglia, président du Comité National Olympique et Sportif Français a déclaré le 4 novembre devant le Sénat : « dans 20, 30 ou 40 ans, on se prépare à une crise sanitaire qui ne sera rien à côté de celle que l’on vit actuellement. L’inactivité physique va inévitablement se traduire par une augmentation des maladies cardio-vasculaires ».
Au niveau psychologique, l’Académie de médecine mettait dès le mois de mars en garde contre les effets de la perte brutale de la liberté de mouvement et la limitation des relations sociales, avec notamment l’augmentation des symptômes anxieux ou dépressifs et une peur de mourir pouvant aboutir à un véritable état de stress post-traumatique. Bientôt, ce ne sont plus nos hôpitaux qui manqueront de lits, mais nos psychologues qui manqueront de divans !
Alors que la crise sanitaire s’annonce très longue, il est urgent de faire évoluer les règles du confinement en prenant en compte les bénéfices du sport et du temps passé dans la nature sur notre santé physique et psychologique. Les limitations spatiales et temporelles dont fait l’objet l’activité physique en plein air aujourd’hui nous paraissent en effet largement disproportionnées.
Des mesures disproportionnées
Les décisions que vous prenez dans le cadre de la lutte contre la Covid-19 vont dessiner le visage de notre société pour de longs mois. Vous avez ainsi décidé de laisser les écoles ouvertes et d’autoriser les visites en EHPAD, ce que nous applaudissons. En revanche, nous ne comprenons pas pourquoi on ne peut pas aujourd’hui en France se promener librement dans les forêts, les plaines et les montagnes, pédaler sur les routes et les sentiers, pagayer sur les lacs et les rivières, nager dans la mer, naviguer ou glisser sur l’océan. L’ordre public sanitaire nous permet de nous entasser dans le métro mais sanctionne le promeneur solitaire parti cueillir des champignons en forêt…
Alors que les activités de plein air favorisent évidemment la distance entre les personnes, l’exercice physique et le lien indispensable avec la nature, le régime qui leur est imposé nous paraît d’autant plus disproportionné qu’il constitue une véritable exception française ! La Belgique autorise en effet 3 personnes à pratiquer ces activités ensemble en respectant les mesures de distanciation sociale, l’Allemagne encourage et responsabilise ses citoyens en leur demandant de ne pas pratiquer d’activités dangereuses afin de ne pas saturer les hôpitaux, le Pays Bas incite à ne pas trop s’éloigner de chez soi, le Canada et la Suisse ne prévoient aucune restriction.
Quand cette crise sera derrière nous, voulons-nous vraiment que notre pays se soit distingué comme celui qui a pris les mesures les plus restrictives sur le sujet, tentant de mettre fin à l’épidémie en empêchant ses habitants d’accéder librement au plein air et à la nature ?
Des mesures vecteurs d’inégalités
Les règles d’accès aux espaces naturels ont été assouplies par rapport au premier confinement, néanmoins votre choix de limiter les déplacements à un kilomètre du domicile vient créer une véritable injustice. A quoi bon ouvrir les forêts, les montagnes et les plages si c’est pour en limiter l’accès aux seuls riverains ? Malheureusement, cette règle vient renforcer l’inégalité de nos concitoyens dans l’accès aux espaces naturels.
Le confinement ne sera donc pas le même si on habite sur le littoral breton, dans les forêts du Morvan, sur le plateau du Vercors ou … à proximité du périphérique parisien. Ce dernier n’est pourtant qu’à une trentaine de kilomètre des Parcs Naturels Régionaux du Vexin, du Gâtinais ou de la Vallée de Chevreuse – tous en Ile-de-France ! Nous voyons dans cet exemple le principal assouplissement à apporter aux règles applicables à la pratique des activités de plein air.
Notre proposition d’assouplissement des règles concernées
Pour toutes les raisons exposées ci-dessus, nous vous proposons donc d’adapter les règles liées à l’activité physique en période de confinement de la manière suivante :
- Autorisation de principe des micro-aventures et des activités de plein air, limitées à 3 adultes avec respect des mesures de distanciation sociale.
- Limitation des déplacements concernés à la région de résidence, sans limite dans le temps.
Aucun peuple ne peut se passer durablement d’avoir accès à la nature, Monsieur le Président. Croyez-nous, la lutte des Français contre la Covid-19 n’en sera que plus performante si nous pouvons crapahuter librement et responsablement !
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A l’initiative de Ferdinand Martinet et Thibaut Labey, co-fondateurs de Chilowé.
Signataires :
- Yann Arthus-Bertrand, photographe
- Julien Bayou, Europe Ecologie les Verts
- Julien Vidal, Ça commence par moi
- Liv Sansoz, championne du monde d’escalade
- Camille Etienne, activiste pour le climat
- Magali Payen, On est prêt
- Guirec Soudée, navigateur
- Benjamin Marias, maire adjoint d’Annecy
- Maxime de Rostolan, Fermes d’Avenir
- Joséphine Bouchez, Ticket for Change
- Antoine Lemarchand, Nature et Découvertes
- Priscilla Telmon, réalisatrice
- Corentin de Chatelperron, auteur et explorateur
- Roland Jourdain, navigateur
- Olivier Archambeau, président de la Société des Explorateurs Français
- Matthieu Tordeur, membre de la Société des Explorateurs Français
- Jérémie Villet, photographe
- Augustin Paluel-Marmont, entrepreneur
- Marine Barnérias, présentatrice de l’émission Littoral
- Thomas Firh, rédac chef les Others
- Enak Gavaggio, Rancho Webshow
- Anne-Sophie Novel, journaliste
- Clémentine Bacri et Adrien Normier, Des Ailes pour la Science
- Damien Castera, surfeur professionnel
- Anne Ghesquière, auteure et éditrice
- Violette Duval, Bornes to Explore
- Olivier Maurel, Co-Gîtons
- Emmanuelle Lalé, Talent & Impact
- Lucie Francini, réalisatrice
- Stéphane Dugast, secrétaire général de la Société des Explorateurs Français
- Sophie Planque, réalisatrice
- Bruno Maltor, blogueur voyage
- Benjamin de Molliens, Expédition Zéro
- Julien Durant, Picture Organic Clothing
- Julien Moreau, éco-aventurier
- Jeanne Lepoix, cycloaventurière
- Elisa Detrez et Max Coquard, Bestjobers
- Clément Maulavé, Hopaal
- Vincent Canu, La Green Session
- Camille Lambrecq et Amanda Maleix, 1 Duvet pour 2
- Xavier Bourgois, The Other Life
- Stan Thuret, cinéaste et navigateur
- Marie et Fred Renaud, Petit Bivouac
- Thibault Liebenguth, AIR Coop
- Benjamin Ferré, navigateur
- Claire Le Bourlot et Arthur Crinquette, les Droners
- Nicolas Sirot, The Flow
- Etienne Veauvy, la Petite Vadrouille
- Stéphen Rater, astronome
- Nil Hoppenot et Marie Couderc, Deux Pas Vers l’Autre
- Christophe Brière, navigateur
- Clara Ferrand, Wildroad
- Vianney Clavreul, guide nature
- Delphine Pocinho et Maxime Pavie, Entre2poles
- Eric Brossier, navigateur polaire
- Laurent Lingelser et Florian Mosca, les Coflocs
- Candice Poitrey, Randonnée Autour de Paris
- Anaëlle Marot, Projet Azur
- Jean-Baptiste Martinon, Baba au Run
- Mathieu Witvoet, Zéro Mégot
- Julien Pannetier et Bruno Valentin, Agence Zeppelin
- Heïdi Sevestre, glaciologue
- Jean-Philippe Beau-Douëzy, naturaliste
- Antoine Mesnage, photographe et vidéaste
- Nathalie Geetha Babouraj, Tribe Empowering School
- Gaetanne Gengembre, G’impacte
- Maÿlis et Cyril Guiraud, l’Arbre aux Etoiles
- Ronan Mérot, photographe
- Grégory Pouy, podcast Vlan
- Audrey Embarek-Rollin et Mickaël Robin, Refuse To Hibernate
- Céline et Fred Lacombe, Les Petits Baroudeurs
- Marie Jansen, journaliste
- Sébastien Lenzi, WeRECY
- Sans oublier Monique, la poule de Guirec
Une fois par semaine, le meilleur de Chilowé pour toutes celles et ceux qui aspirent à un mode de vie local, joyeux et tourné vers la nature.