Ça y est, c’est fait ! Mathieu, aka Macareux Polisson de la team Chilowé a couru (et terminé!) l’UTMB Mont-Blanc. 175 km avec 10 000 m de D+ avalés un peu moins de 35 heures. Lundi, à peine 24 heures après cette virée autour du Mont-Blanc, il était au bureau. Du coup, on en a profité pour faire un premier bilan à chaud avec lui.
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Quels moments resteront à jamais gravés dans ta mémoire ?
Difficile de choisir car l’UTMB c’est pour moi un projet qui a débuté il y a près de 10 ans, il y avait donc beaucoup d’attentes. Mais s’il fallait en choisir 3, je dirais d’abord le passage au col du Bonhomme au 47ème kilomètre. On vient de quitter toute l’effervescence du départ de la course (où j’ai lâché une petite larme évidemment). Il fait nuit, il fait (très) froid et on traverse une tempête de neige. Des conditions dantesques mais pourtant je me sentais bien. Je savais pourquoi j’étais là, j’étais où je voulais être.
Le deuxième moment, c’est quand Augustin et Hugo de la team Chilowé me font la surprise de me rejoindre au refuge du Bonatti côté italien au 95ème kilomètre. On vient d’attaquer la journée du samedi et après de superbes sensations durant la première nuit, j’ai mon premier coup de mou. L’occasion pour eux de me faire un incroyable discours de motivation. Ni une, ni deux, ça m’a donné la chair de poule et des forces que je ne pensais plus avoir à ce moment-là.
Enfin, le 3ème et dernier moment fort, c’est bien évidemment l’arrivée ! Parce que je sais qu’il y aura ma femme, Manon, la première personne que je vois et que j’ai envie de voir. Mais surtout parce que j’ai ressenti un énorme soulagement, celui d’être arrivé, en sécurité auprès de mes proches, après quatre dernières heures très compliquées, à naviguer divaguer entre fatigue et hallucinations.
Qu’est ce qui auraient pu te faire abandonner (et ce qui t’a sauvé) ?
Sans aucun doute les conditions météo de la première nuit. Il me semble que c’est l’édition la plus difficile en terme de météo depuis longtemps. Le froid, la neige et surtout la boue, qui ont rendu les descentes compliquées, voire dangereuses. Heureusement, j’avais du bon matos (coucou à nos copains de chez WISE). Je me sentais bien, dans ma bulle, tout emmitouflé.
Dans le trail, il y a beaucoup de variations d’état de forme. Quelques hauts mais surtout beaucoup de bas ! J’ai vécu durant cet UTMB des grosses chutes de motivation évidemment. Mais dans ces moments, je me suis toujours senti soutenu. Par Augustin, Hugo et Manon, qui me rappelaient sans cesse « tu sais pourquoi tu es là ». J’avais également demandé à tous mes proches d’envoyer des messages vocaux que j’ai pu écouter tout au long du parcours, quand j’en ressentais le besoin. Sans eux, sans mon assistance, sans mes proches qui poussaient derrière leur écran, l’histoire aurait été différente, j’en suis certain.
Augustin : « Ce qui m’a marqué pendant ces 35 heures à suivre Mathieu, c’est de voir à quel point cette course est dure mentalement. Mathieu et les autres participant se sont battus contre eux-mêmes pour aller au bout. »
Et puis enfin, durant la dernière nuit à partir du 145ème kilomètre, j’ai eu un gros coup de fatigue, qui a engendré d’énormes hallucinations visuelles et sonores. Je ne faisais plus la différence entre les frontales et les étoiles, je voyais des personnages à la place de cailloux. Je me sentais surtout très seul, presque perdu. Dans les parties techniques et exposés, j’avais un peu peur de tomber (promis maman c’est la dernière fois). Dans mon cerveau ça ne tournait plus rond, je me disais un peu n’importe quoi. C’est la première fois que je me fais aussi peur sur une course. Je m’en suis sorti grâce à l’entraide avec les autres traileurs. Dans ce genre de situation, la solution c’est de ne pas rester seul et d’affronter ensemble !
Attente VS réalité : tout s’est passé comme tu l’imaginais ?
Je m’attendais à avoir plus de crampes et moins envie de dormir ! Mais surtout, je m’attendais à beaucoup d’effervescence… et il y en a eu encore plus que ce que je pensais ! Que ce soit sur la ligne de départ, à Saint-Gervais ou encore à Notre-Dame de la Gorge, c’était lunaire ! Tous ces gens qui affrontent les conditions pour venir nous encourager, c’était très émouvant. Et très grisant. On peut reprocher beaucoup de chose à ce sommet mondial de l’ultra-trail, mais niveau ambiance, la réalité dépasse tout ce qu’on peut imaginer.
Mais surtout, pendant ces 10 années de préparation, j’avais visualisé et projeté beaucoup de choses sur l’arrivée : du monde, une ambiance de fou… Pour ma part, je suis arrivé le dimanche matin, un peu avant 5h. Il y avait mes proches et quelques autres personnes, pas de musique, pas de bruit. Personnellement, j’ai ressenti assez peu d’émotions. Je ne savais pas trop quoi dire, ni faire, j’étais trop fatigué pour ça. J’étais juste soulagé d’être arrivé, de voir mes proches, de prendre une bonne douche et de sauter dans un lit. Ce n’est que le lendemain matin que j’ai enfin réalisé ce que je venais d’accomplir.
Qu’est ce que qui a rendu cette course unique ?
Ça faisait de longues années que j’essayais de faire cette course sans jamais être tiré au sort et finalement ça tombe l’année où c’est le plus compliqué : un nouveau job très prenant et l’arrivée de nos jumeaux avec Manon. Mais au final, c’est ce contexte qui lui donné ce côté collectif et fédérateur : avec le soutien de ma famille, de mes amis, mes collègues, les partenaires qui nous ont suivi. J’ai senti une énergie assez dingue autour du projet et ça m’a poussé toute la course. J’avais cette année un petit truc en plus qui faisait que je ne pouvais que y arriver en allant puiser l’énergie dans mon entourage. C’est d’ailleurs ce qui me fait dire aujourd’hui (mais ne jamais dire jamais) que je ne referai jamais l’UTMB. J’ai envie de garder cette émotion intacte !
Et la suite ?
Du repos, beaucoup de repos. On va ranger les chaussures de trail pendant un petit moment pour profiter des proches et des jumeaux. Puis viendra le temps de réfléchir au prochain projet, en OFF ou avec un dossard, mais de manière beaucoup plus confidentielle cette fois-ci. Mais avant ça, on vous réserve une petite surprise avec la sortie d’un documentaire sur la course ! J’espère vous embarquer une dernière fois dans cette aventure qui montre encore une fois que seul, on va plus vite, mais qu’ensemble, on va (beaucoup, beaucoup) plus loin.

Une fois par semaine, le meilleur de Chilowé pour toutes celles et ceux qui aspirent à un mode de vie local, joyeux et tourné vers la nature.