Chaque automne, Philippe et son fils James, 8 ans (alias Puma Loyal et Jaguar Loquace) partent écouter le brame du cerf. Une virée père-fils, de nuit, au milieu de la forêt de Fontainebleau… Ce moment magique, ils ne le rateraient pour rien au monde !
Une nuit aussi attendue que Noël
« Cette année, la date est fixée au mercredi 1er octobre… Très tôt ! James n’avait exceptionnellement pas classe ce matin-là. La nuit était encore éclairée par une demi-lune. C’était parfait. Il a enfilé un manteau bien chaud, une bonne paire de chaussures, une frontale et on est parti ! Objectif : aller écouter le brame du cerf, à côté de chez nous, dans la forêt de Fontainebleau (Seine-et-Marne). Chez ces cervidés, ce cri puissant, appelé aussi raire, annonce le début de la période de reproduction de l’espèce et le début de l’automne.Cela fait maintenant trois ans que James et moi partageons cette expérience sauvage et mystérieuse dans l’obscurité de notre forêt fétiche. Mon fils attend cette nuit avec autant d’impatience que celle de Noël… C’est devenu plus qu’une tradition : un rituel !

Un spot rien qu’à nous
Bien sûr, on a notre spot à nous. Je l’ai déniché il y a quelques années. Tout part d’un article publié dans le journal de l’association « Les amis de la forêt de Fontainebleau ». Durant la Seconde Guerre mondiale, le 6 février 1944, un B17, un avion de l’armée américaine, est abattu par les Allemands et s’écrase dans un massif près d’Arbonne-la-Forêt. Tout l’équipage décède. À la Libération, les familles des soldats retrouvent le lieu du drame et y plantent des Séquoias sempervirens en mémoire de leurs défunts.
J’ai alors décidé de partir à la recherche de l’emplacement de cette tragédie. C’est lors d’une fin d’après-midi d’automne, au crépuscule, après une troisième incursion dans le massif, que je suis finalement tombé nez à nez avec ces arbres majestueux qui contiennent les âmes de ces soldats. Et comme pour annoncer la fin de cette sorte de « chasse au trésor », le cri rauque et guttural d’un cerf résonna dans la forêt qui borde la plaine en contrebas du coteau. Puis un autre, et encore un autre… Je suis resté ainsi pendant une bonne heure, sous la coupe de ces séquoias sacrés, à écouter la joute sonore de ces rois de la forêt.
Depuis, c’est là-bas que l’on se rend avec James chaque année, solennellement, le père et le fils, que ce soit au crépuscule ou juste avant l’aube…




Des souvenirs qui restent
Cette fois encore, la chance nous a souri : les maîtres des lieux au nombre de quatre ou cinq étaient au rendez-vous et encore en grande forme malgré la nuit de brame qu’ils venaient probablement de passer ! Pendant plusieurs heures, nous avons arpenté les pistes sylvestres en essayant de nous déplacer le plus silencieusement possible pour éviter d’être trop intrusifs. Souvent, nous nous sommes assis à la croisée de chemins pour nous plonger dans cette sorte d’hypnose sonore, presque dans un état de transe…
Pour James, c’est cette « peur en même temps que la joie » qui le poussent à sauter de son lit pour partir dans la nuit fraîche qui précède l’aube et écouter ce concert très cérémonial donné par le Sauvage, celui qui fait encore battre le cœur de la forêt de son enfance. »











